Situation “tendue” dans les villes du nord du Kosovo
“La situation sécuritaire dans les municipalités du nord du Kosovo est tendue”, a expliqué la mission de l’Otan au Kosovo (Kfor) dans un communiqué publié dimanche soir. La police du Kosovo a déclaré dimanche avoir essuyé des tirs dans le nord du pays, où des barricades ont été érigées sur les routes menant à la Serbie pour protester contre la politique frontalière du gouvernement. La police a déclaré qu’aucune blessure n’avait été signalée lors de la fusillade. Les deux points de passage ont été fermés à la circulation. Dimanche soir, des centaines de Serbes du Kosovo – la population vivant au Kosovo qui ne reconnaît pas l’autorité du gouvernement du Kosovo – ont rassemblé des camions, des camions-citernes et d’autres véhicules lourds sur les routes menant aux points de passage de Jarinje dans les villes de Leposavic et Brnjak, deux stations des villes frontalières du nord du pays. Une foule s’est alors installée autour des barricades, avec l’intention affichée d’y passer la nuit. Des sons de sirène ont également été entendus pendant plus de trois heures dans la ville septentrionale de Mitrovica, selon Reuters.
Un regain de tensions lié aux nouvelles règles d’entrée
A l’origine de ces tensions : de nouvelles règles d’entrée au Kosovo, qui devaient entrer en vigueur lundi, imposent à toute personne entrant dans le pays avec une carte d’identité serbe d’avoir un document provisoire pendant son séjour. A ce sujet, le Premier ministre Albin Kurti avait précisé qu’il s’agissait d’une mesure de réciprocité contre la décision de la Serbie d’exiger la même chose des Kosovars entrant sur son territoire. Le gouvernement du Kosovo a également donné aux Serbes du Kosovo deux mois pour remplacer leurs plaques de véhicules serbes par des plaques de la République du Kosovo.
Les règles ont été suspendues à l’initiative de Washington
Le soir même, le gouvernement du Kosovo a finalement décidé de reporter d’un mois l’entrée en vigueur de ces nouvelles règles à la frontière avec la Serbie. Ils seront finalement mis en place à partir du 1er septembre. Nous nous félicitons de la décision du Kosovo de transférer des mesures le 1er septembre. Attendez-vous à ce que tous les barrages routiers soient levés immédiatement. Les questions ouvertes doivent être traitées dans le cadre d’un dialogue facilité par l’UE et se concentrer sur la normalisation globale des relations entre le Kosovo et la Serbie, nécessaire à leur intégration dans l’UE – Josep Borrell Fontelles (@JosepBorrellF) 31 juillet 2022 Ce report a été annoncé après une rencontre avec l’ambassadeur des États-Unis au Kosovo, Jeffrey Honevier. La décision a été saluée par le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, via Twitter, appelant à la « levée immédiate de tous les barrages routiers ».
Une politique frontalière contestée depuis plusieurs mois
La récente escalade de tension renvoie à une politique frontalière du gouvernement du Kosovo qui avait déjà été remise en cause quelques mois plus tôt. En septembre 2021, le nord du Kosovo a été le théâtre de vives tensions et de manifestations quotidiennes lorsque le gouvernement de Pristina – la capitale du pays – a décidé pour la première fois d’interdire les plaques d’immatriculation serbes sur son sol. Les autorités kosovares ont alors déployé des forces de police spéciales pour faire appliquer ladite loi, mettant le feu à la poussière dans la région. La circulation a été bloquée principalement aux deux postes frontières, tandis que de nombreux Serbes ont bloqué les routes d’accès au Kosovo et incendié plusieurs bâtiments, dont un bureau de douane. Face à ces tensions, l’Otan avait réagi en renforçant sa présence dans la région, a expliqué France 24. La Serbie n’a jamais reconnu l’indépendance du Kosovo depuis sa proclamation unilatérale en 2008. De même, les Serbes du Kosovo restent fidèles à Belgrade, dont ils dépendent économiquement. Le président serbe Aleksandar Vucic a déclaré dimanche dans un discours à la nation que la situation au Kosovo n’avait “jamais été aussi compliquée” pour la Serbie et les Serbes qui y vivent. “L’atmosphère est en ébullition”, a-t-il poursuivi, ajoutant que “la Serbie gagnera” si les Serbes sont attaqués. De son côté, Albin Kurti a accusé le président serbe de semer le “trouble”.
L’OTAN prête à intervenir dans la région
Face à cette escalade, la mission de l’Otan chargée d’assurer la stabilité dans la région depuis 1999 s’est dite prête à intervenir si nécessaire, dans un communiqué diffusé dimanche soir. L’alliance a rappelé sa forte présence sur le terrain et a précisé qu’elle est en contact avec les représentants des autorités kosovares et le département serbe de la défense. pic.twitter.com/LK1MB2cSoJ — @OTAN – KFOR (@NATO_KFOR) 31 juillet 2022 Il a également précisé qu’il continuait néanmoins à “soutenir pleinement le processus de normalisation entre Pristina et Belgrade” et a appelé “toutes les parties à poursuivre les négociations”. En 2011, les deux pays ont entamé un dialogue pour tenter de résoudre leurs obstacles en vue d’une éventuelle future adhésion de la Serbie à l’Union européenne, mais depuis lors, aucun progrès significatif n’a été constaté.