Publié à 11h28
                Clara DescurningesLa Presse canadienne             

La présentation du produit peut faire la différence pour les consommateurs qui mangent aussi de la viande, selon les données recueillies. En effet, les participants à la recherche à qui on a montré un hamburger “à base de plantes” avaient tendance à le considérer comme plus respectueux de l’environnement et plus sain que ceux à qui on avait montré le même produit, mais étiqueté “substitut de viande”. Ils étaient également plus ouverts à l’essayer. Cependant, cette découverte ne tient plus la route lorsque l’on ajoute une variable qui peut sembler insignifiante : la couleur de l’emballage. En effet, une viande hachée “végétale” décorée en vert est considérée comme moins écologique que le même produit sur fond rouge. De plus, “le produit qui avait le descripteur” substitut de viande “et qui était rouge semblait être meilleur pour l’environnement, et les participants avaient de plus fortes intentions d’essayer le produit que presque toute autre combinaison”, a déclaré l’un des co-auteurs de l’étude. Professeure agrégée universitaire de marketing Caroline Roux, en entretien téléphonique. Selon un sondage Angus Reid de 2019, seulement 39 % des Canadiens ont essayé ce type de produit. Parmi les 18 à 35 ans, ce nombre grimpe à 58 %, et 48 % se disent prêts à essayer s’ils ne l’ont pas déjà fait.

La force de l’habitude

“Cela nous a vraiment surpris”, a-t-il déclaré, étant donné que le vert a tendance à être associé aux plantes, tandis que le rouge évoque des images de chair animale. Le professeur a formulé plusieurs hypothèses pour expliquer ces résultats. D’autres études suggèrent déjà que nous avons naturellement tendance à nous tourner vers les conceptions d’emballage auxquelles nous sommes habitués, a-t-il déclaré. “Très tôt, quand les protéines alternatives sont arrivées sur le marché, il y avait beaucoup de marques qui traînaient des images, des descriptions et des couleurs plus animales, histoire de convaincre les consommateurs carnivores de changer”, se souvient-il. Donc l’union aurait pu se faire là-bas. Les premières générations de substituts protéiques, comme « le tofu, le tempeh ou les légumineuses », ont été commercialisées avec des références végétales, pour cibler les végétariens et végétaliens. Une autre possibilité serait que la présentation physique “change la catégorie de référence avec laquelle les participants vont comparer le produit”. “Il est rare qu’en tant qu’êtres humains, nous évaluions quelque chose dans le vide”, a expliqué le professeur Roux. On va essayer de trouver un repère et dire que c’est plus ou moins sain que ça. Donc, quand vous voyez “légume” et vert, j’ai l’impression que les participants pensaient essentiellement à des produits similaires ou à des choses comme le tofu, ce qui rendait l’aliment testé moins impressionnant. Au lieu de cela, “lorsque les participants ont vu du rouge et un” substitut de viande “, ils ont probablement pensé à de la viande animale, et là, la différence était beaucoup plus grande dans leur esprit”.

Effets inattendus

“Mon principal conseil est de ne pas vous fier aux connaissances préconçues que vous pourriez avoir sur ce que vous pensez être une association de couleur ou une association de nom”, a conclu le professeur, avertissant que les entreprises “pourraient être surprises du résultat” causé par leurs choix. Après tout, “un article rouge dans la section végétalienne se démarquerait beaucoup plus qu’un article rouge dans la section burger et vice versa”. Un produit vert dans la section végétalienne perdra face à la concurrence, tandis que dans la section de la viande hachée, il se démarquera vraiment. L’interaction entre plusieurs variables, telles que le nom et la couleur, peut également créer des résultats inattendus, il est donc préférable d’expérimenter avant de lancer un produit.

Méthodologie

L’article « Explorer comment les descriptions de produits et les couleurs des emballages influencent la perception des consommateurs des alternatives à la viande » a été publié en novembre 2021 dans la revue scientifique Appetite. Les auteurs sont Daniella Sucapane, Caroline Roux et Kamila Sobol. L’article contient les résultats de trois études. La première (149 participants) confirme l’association symbolique entre la couleur verte et les végétaux, et entre la couleur rouge et la viande, dans l’esprit des consommateurs. La seconde (148 participants) se concentre uniquement sur les noms de produits. Le troisième (274 participants) étudie les interactions entre la couleur et la dénomination. Le produit utilisé en exemple provient de la société Lightlife. Les personnes qui étaient déjà végétariennes, végétaliennes ou qui connaissaient déjà le produit ont été exclues de l’étude pour éviter de fausser les données.