Kaba Keita vit la vie dont il a toujours rêvé au Québec. Il est arrivé en 2018 sous statut de réfugié après avoir fui la Guinée sous la menace de sa famille, a trouvé l’amour, s’est marié et a un travail qu’il aime au restaurant Continental. Si l’immigration veut le renvoyer dans son pays, c’est parce que lors d’une audience sur le statut de réfugié en mars dernier, il a déclaré avoir fait la paix avec son père et sa famille, ce qui élimine le danger qui rôde dans le pays de. « Ils m’ont fait jurer trois fois de dire la vérité, alors c’est ce que j’ai fait. Mais maintenant, ma vie est ici », insiste celui qui a vu un fonctionnaire révoquer son statut de réfugié en juillet et ordonner son départ du Canada avant le 16 septembre. Soutien de son employeur Pourtant, personne ici ne souhaite voir Kaba Keita retourner dans son pays, à commencer par son employeur. “C’est un excellent employé. Je le paie 25 $ de l’heure pour faire la vaisselle, donc nous sommes d’accord que c’est parce qu’il est important pour notre équipe », a déclaré le copropriétaire de Continental, Mathieu Pettigrew, ajoutant qu’il était prêt à témoigner en son nom. nécessaire. C’est même le restaurateur qui a engagé un avocat pour tenter de régler la situation de son employé dans les délais. “Je ne demande pas d’argent au gouvernement, pas de subvention, même maintenant je gagne des honoraires parce que je veux juste qu’il travaille pour nous. Parce que s’il part, qu’est-ce qu’on fait ? Dois-je payer pour le faire revenir plus tard ? C’est stupide », déplore M. Pettigrew. “Tout le monde perd” “Qui gagne en déportant ce type”, demande l’avocat de M. Keita, Me Maxime Lapointe. “Tout le monde est perdant dans cette histoire.” A commencer par son mari et sa femme, Dusso Coulibaly. Le couple vit dans un logement que Madame ne pouvait se permettre avec son seul salaire. Toute leur vie va être bouleversée. “Nous ne devons rien à personne. Nous payons nos impôts. […] Quand mon mari partira, il devra déménager, je perdrai mes affaires. On va bien, moi et mon mari, je parle ma langue à la maison, je ne veux pas être seule ici », dit Mme Coulibaly en ravalant un sanglot. L’homme dit qu’il est un atout pour la société. Il ne comprend pas pourquoi ils l’ont renvoyé chez lui. “C’est difficile. Mettez-vous à ma place”, demande M. Keita. « Dès mon arrivée au Québec, j’ai trouvé un emploi. Quand j’ai reçu mon premier bordereau, j’étais fier de l’envoyer à l’aide sociale pour qu’ils arrêtent de m’envoyer de l’argent. J’aime vivre ici », plaide-t-il. “S’il était un criminel, une personne malhonnête, je serais le premier à dire qu’il devrait partir, mais il ne l’est pas. Quand il me demande ce qu’il a fait de mal, je ne sais même pas quoi dire. Il n’a rien fait, il est victime d’un cycle de bureaucratie”, insiste son employeur qui, comme M. Keita, espère un sursis dans le dossier. “Le gouvernement doit nous aider”

La Guinée menacée d’expulsion : Appel à traquer et légaliser certains sans-papiers

L’avocat de Kaba Keita, menacé d’expulsion, appelle le gouvernement à plus de souplesse dans le traitement de ces affaires, notamment dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre. “L’agent a choisi d’appliquer la loi très strictement et on ne peut pas lui en vouloir, c’est la loi. Mais un agent plus détendu aurait probablement donné un délai pour créer un dossier de parrainage et faire en sorte que le dossier soit réglé », explique Me Maxime Lapointe, avocat spécialisé en immigration chargé du dossier d’origine guinéenne. Identifier et organiser L’avocat prévient que de tels cas deviendront courants avec les nombreux statuts de réfugiés accordés, en particulier après les vagues d’entrée de Roxham Road. Il appelle le gouvernement à aplanir ces problèmes une fois de plus que les réfugiés trouvent du travail auprès d’employeurs qui cherchent désespérément à embaucher. “Les élections approchent. J’espère que le prochain gouvernement entreprendra d’identifier les sans-papiers pour déterminer combien il y en a et surtout, pour voir si on peut accompagner certains d’entre eux, qui sont de vrais travailleurs, à légaliser leur statut », demande Me Lapointe. C’est aussi le point de vue de l’employeur de Kaba Keita, le propriétaire du restaurant Continental, qui souhaite que le gouvernement agisse pour simplifier la vie des entrepreneurs qui peinent à embaucher. “Laissons le gouvernement nous aider un peu. On a vu pendant la pandémie que les choses peuvent aller vite quand il y a une volonté. Mais dans le cas des pénuries de main-d’œuvre et de l’immigration, il ne semble pas y avoir de volonté d’accélérer les dossiers », déplore Mathieu Pettigrew. Essai de programme Maxime Lapointe propose un projet pilote de régularisation d’une durée de trois ans, le temps de l’étude d’impact. « Nous pourrions essayer un programme d’établissement. Quand les conditions sont réunies, on prolonge le statut de réfugié avec un permis de travail et au bout de deux ans on réévalue », explique l’avocat, qui estime qu’une telle mesure permettrait aux personnes risquant l’expulsion ainsi qu’aux entreprises de souffler un peu. “Les employeurs et le gouvernement doivent travailler ensemble pour garder certaines de ces personnes en emploi.”