Posté à 17h00

Le gouvernement Legault a décidé de réduire de près des deux tiers chaque année la quantité minimale de carbone qu’il doit investir dans le transport collectif. La nouvelle, annoncée par un décret publié mercredi dans la Gazette officielle, à la veille de la mise à jour du troisième projet de liaison Québec-Lewis, inquiète l’Alliance TRANSIT. Le groupe des organisations pro-transport en commun y voit « un très mauvais message » des intentions du gouvernement Legault quant à sa vision du développement du secteur. La part minimale des sommes levées sur le marché du charbon et destinées au « financement des mesures pour les transports et notamment pour les transports publics et la mobilité durable », qui était auparavant fixée à 66 %, est désormais ramenée à 25 %, apprend-on par décret. Rappelons que le Québec a accumulé cette année dans le Fonds électricité et changements climatiques (FECC) – anciennement connu sous le nom de Fonds vert – un montant beaucoup plus élevé que prévu grâce au marché du carbone, soit 1,3 milliard au lieu de 800 millions. Les fonds de ce fonds peuvent financer des projets non liés au transport en commun, mais doivent être utilisés pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES). Cependant, comme le rappelle le cabinet du ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Benoit Charette, la révision du volet FECC pour les transports avait déjà été prévue, et ce, dans le cadre de l’adoption d’une loi visant principalement à assurer une efficacité gouvernance de lutte contre le changement climatique et de promotion de l’électricité (loi 44) en 2020. Mais l’Alliance TRANSIT, qui avait déjà fait part de ses inquiétudes sur le financement des transports en commun au moment du vote du projet de loi, s’inquiète de cette baisse importante. “C’est vraiment bas [cette part de 25 %], nous sommes surpris. «On ne pensait pas que ce serait si bas, a dit Samuel Pagé-Plouffe.

Travaux autres que le transport

Québec a déjà affirmé son intention d’allouer une part plus importante de l’argent du FECC à d’autres projets de réduction des émissions de gaz à effet de serre provenant du développement des transports en commun, alors que le pourcentage des investissements qui y sont consacrés a déjà commencé. En effet, pour l’année 2021-2022, environ 400 millions ont été alloués à des projets de transport par l’intermédiaire du FECC, soit environ 31 % du total, indique Rosalie Tremblay-Cloutier, porte-parole de la ministre de l’Environnement et de la Maîtrise du climat. monnaie. Un record de 55 milliards de dollars de projets de transport en commun a déjà été prévu par notre gouvernement dans le cadre du Programme québécois des infrastructures (PQI). Rosalie Tremblay-Cloutier, porte-parole de la ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques « Il est donc important que nous puissions prendre la majeure partie du FECC pour des mesures visant à électrifier nos transports, à éliminer les émissions de carbone de nos bâtiments, à réduire nos émissions corporatives et à adapter notre territoire aux changements climatiques », explique Rosalie Tremblay-Cloutier. . A noter que les 55 milliards de dollars prévus dans le PQI pour les transports en commun comprennent des investissements futurs, qui ne sont pas encore en construction, ou l’élargissement de l’autoroute pour l’aménagement de voies. Si l’on exclut ces projets, le PQI 2022-2032 rapporte toujours plus d’argent pour le réseau routier que pour les transports en commun, soit 30,7 contre 13,4 milliards. Le gouvernement Legault s’était toutefois engagé à investir également dans les deux secteurs. Le décret de mercredi est de mauvais augure, selon l’Alliance TRANSIT, alors que la Politique de mobilité durable du Québec prévoit une augmentation annuelle de 5 % de l’offre de transport en commun, qui s’accompagne habituellement de plus d’investissements. Le financement de la mobilité durable est déjà une source de préoccupation très importante. Nous sommes à la croisée des chemins, les villes recherchent des sources de financement et le gouvernement reconnaît que c’est un défi. Samuel Pagé-Plouffe, coordonnateur de l’Alliance TRANSIT

Québec “une balle dans la jambe”

Selon le professeur Pierre-Olivier Pineau, responsable du secteur de la gestion de l’énergie à HEC Montréal, cette nouvelle n’est pas nécessairement mauvaise pour l’industrie, à condition que Québec annonce bientôt comment il compte financer la communauté des transports de façon durable. “Ce qu’il faut, c’est pérenniser le financement des transports publics et ne pas dépendre de la vente d’un produit [le carbone] dont on essaie de se débarrasser, explique-t-il. […] On veut arrêter d’émettre, on veut émettre moins, et donc les revenus du marché du charbon ne doivent pas servir à financer des infrastructures qui vont exister longtemps. » Mais le gouvernement Legault n’a pas encore trouvé d’alternative aux revenus du marché du charbon pour financer les transports en commun, ce que Pierre-Olivier Pineau trouve inquiétant. Dans un contexte où nous n’en avons pas encore, il est néfaste de retirer le financement des transports en commun et cela montre que le gouvernement est dans une improvisation assez complète concernant le changement climatique. Pierre-Olivier Pineau, responsable de la gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal Selon M. Pineau, le Québec a “une balle dans le pied” puisque le principal problème est “le transport par véhicules motorisés individuels”. “Si nous n’investissons pas dans des alternatives, et les transports publics en font partie, nous ne faisons que nous créer des problèmes pour les décennies à venir”, a-t-il déclaré. Afin d’atteindre sa cible de neutralité carbone d’ici 2050, Québec pourrait encore choisir d’investir l’argent du FECC dans d’autres projets qu’il juge les plus efficaces, indique le directeur scientifique de l’Institut Trottier de l’énergie à Polytechnique Montréal, Normand Mousseau. . “Si on décidait de prendre cet argent et de le dédier au transport par camion, aux camions électriques, ce ne serait pas du transport en commun, mais ça aurait un impact”, explique-t-il. Réduire le réchauffement climatique à 1,5 °C est encore possible à condition de réduire les émissions mondiales de GES d’ici 2025 au plus tard, a averti le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) dans un important rapport publié le 5 avril.