“Plus d’une centaine de communes en France aujourd’hui n’ont plus d’eau potable”, a prévenu ce vendredi 5 août 2022, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, lors d’une visite dans les Alpes-de-Haute-Provence. , Les canicules successives et le manque de précipitations ont contraint les communes concernées à revoir leur approvisionnement en eau, tandis que l’ensemble de la France métropolitaine est soumise à des restrictions d’utilisation de l’eau en raison de la sécheresse. La situation est telle que dans certains cas, certaines municipalités ont été obligées de fermer complètement le robinet.
En dernier recours, fermez l’eau du robinet
Pour faire face à la situation, considérée comme “historique” par le gouvernement, certaines communes utilisent des camions-citernes pour s’approvisionner en eau car leurs réserves sont à sec ou presque. Ils s’approvisionnent donc auprès des voisins. La seule solution pour éviter un manque d’eau du robinet pour les riverains.
Mais dans certains cas, les communes sont obligées de fermer carrément le robinet, ce qui s’est produit dans plusieurs communes françaises, temporairement, comme l’a constaté franceinfo. Soit dans la consommation de la ration et éviter qu’elle soit complètement sèche. Soit pour des raisons de sécurité, car si l’aquifère est asséché, ce que la pompe aspire et sort au robinet donne une eau trouble et boueuse, impropre à la consommation.
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Mais fermer l’eau du robinet, est-ce vraiment légal ? Actu.fr a interrogé François Brottes, au début de la “loi Brottes”, lorsqu’il était député (PS) de l’Isère et président de la commission des affaires économiques.
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Il est interdit de couper l’eau, mais…
Interdire ou non les coupures d’eau alimente le débat depuis des années. L’homme politique a fait voter la loi du 15 avril 2013, “visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et contenant diverses dispositions sur la tarification de l’eau et les éoliennes”. L’article 19 interdit simplement le débranchement de l’eau, même en cas de facture impayée.
Cette loi a été contestée notamment par la Fédération professionnelle des entreprises de l’eau (FP2E), qui regroupe la quasi-totalité des entreprises privées qui gèrent les services d’eau et d’assainissement en France, et par la Fédération nationale des sociétés concessionnaires (FNCCR), une association de collectivités territoriales. spécialisée dans les services publics locaux de distribution d’électricité, de gaz, d’eau, d’assainissement, de communications électroniques, de collecte et de valorisation des déchets.
En résumé, ces organisations estimaient que la « loi Brottes » encourageait les comportements frauduleux. Ils n’ont pas gagné. De par la loi François Brottes et son décret exécutif de février 2014, les coupures d’eau dans une résidence principale sont interdites, quelle que soit la situation financière des clients concernés.
Et la justice a étendu cette interdiction aux réductions de débit, estimant qu’elles ont le même effet qu’une coupure en privant les habitants de leur usage normal de l’eau, élément nécessaire pour qualifier un logement décent.
La réduction du débit est obtenue en plaçant une “lentille” sur la conduite d’eau, un dispositif qui limite le diamètre du raccordement des abonnés concernés. La Saur et Veolia ont été condamnés à plusieurs reprises pour cette pratique.
Et la sécheresse ? Le robinet peut-il être “légalement fermé” comme le font des dizaines de communes depuis plusieurs semaines ? “Peut-être que la jurisprudence le dira”, répond aujourd’hui François Brotes.
L’eau est impropre à la consommation dans trois communes. (©Illustration Fabien Hisbacq – Actualités Occitanie)
“L’accès à l’eau, un besoin humain essentiel”
Le Conseil constitutionnel avait été séquestré en 2015 par la Cour de cassation sur une question prioritaire constitutionnelle soulevée pour la société Saur. Et il avait précisé la volonté du législateur. « En interdisant aux distributeurs d’eau de couper l’eau de toute résidence principale tout au long de l’année pour non-paiement de factures, le législateur a entendu garantir l’accès à l’eau à toute personne résidant dans cette résidence. Ne limitant pas cette interdiction à une période de l’année, il souhaitait sécuriser cet accès pour toute l’année. En prévoyant que cette interdiction s’impose quelle que soit la situation des titulaires du contrat, elle a, ainsi qu’il ressort des travaux préparatoires de la loi du 15 avril 2013 précitée, assuré qu’aucune personne en situation précaire ne puisse être privée de eau . Que le législateur, en assurant dans ces circonstances l’accès à l’eau répondant à un besoin essentiel de l’individu, a ainsi poursuivi l’objectif de la valeur constitutionnelle que constitue la possibilité pour tous d’avoir un logement décent. , a écrit le tribunal.
“Les marchands d’eau pourraient en profiter pour contourner la loi”
En juin 2021, le ministère de la Transition écologique rappelait lui, dans un “guide de mise en place des mesures pour limiter les usagers de l’eau en période de sécheresse” le pouvoir des maires.
“Les usages de l’eau des réseaux publics et privés d’eau potable sont strictement destinés à répondre aux besoins d’approvisionnement en eau potable. Dès qu’un arrêté préfectoral de restriction a été pris, le maire d’une commune, dans le cadre de l’action du même arrêté limitant temporairement les usages, peut décider de prendre un arrêté communal au moins aussi restrictif que l’arrêté préfectoral. A tout moment, le maire peut prendre des mesures générales de police administrative adaptées à la situation locale pour limiter l’usage de l’eau, dans le respect de l’hygiène et de la sécurité – article L.2212-2 du code général des collectivités territoriales. »
En clair, le danger aujourd’hui, s’inquiète François Brottes, c’est que « sur la base de cette interprétation large de la loi, le législateur se saisisse de la matière pour en limiter la portée (sous prétexte de sécheresse) et que le moment où les négociants en eau puissent faire pression pour le démêler…”
Une question qui pourrait être ramenée sur la table, alors que la question du partage de l’eau bouscule la classe politique. La députée LFI Mathilde Panot a ainsi revendiqué sur Twitter le droit à l’eau « qui est inscrit dans la Constitution » : « L’eau doit d’abord venir à la vie et non aux profits ! “.
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