Depuis la Seconde Guerre mondiale, l’extrême droite n’a jamais été aussi proche du pouvoir. Son arrivée dans l’entreprise aurait des conséquences importantes pour notre société et les valeurs de notre pays. La volonté de sa candidate de s’éloigner de l’Europe et de ses principes démocratiques pour se rapprocher de leaders populistes comme les dirigeants hongrois et polonais ou encore d’un dictateur comme Poutine semble particulièrement troublante. Ces points ont été maintes fois évoqués, à juste titre, pour le bloquer. Mais qu’en est-il de son plan financier? La gestion d’un État peut être comparée à celle du budget d’une famille ou d’une entreprise. Si vous empruntez, vous devez dépenser de l’argent pour le rembourser, vous devez être fiable et vous avez besoin de garants. Pour la France, ces trois critères se traduisent par : préparer l’avenir économique du pays, gagner la confiance des créanciers et soutenir l’Europe.
Une liste à la Prévert
Le programme de Marine Le Pen est une liste de nouvelles dépenses du Pr la Prévert, largement sous-estimée à 68 milliards d’euros/an, qui est malheureusement financée à l’aide de recettes à temps partiel. À commencer par des économies de 16 milliards de dollars/an associées aux mesures d’immigration. Ce calcul est aérien : toutes les études montrent que les immigrés ne coûtent presque rien en argent public, car les cotisations sociales de ceux qui travaillent compensent les coûts induits par notre système de protection sociale. Les 15 milliards de recettes nouvelles que le candidat promet de réaliser dans la lutte contre la fraude fiscale et sociale semblent hypothétiques – ce qui ne résultera en aucun cas de l’application de la réglementation européenne sur le commerce électronique et la facturation électronique (pour lutter efficacement contre la fraude à la TVA), et du programme mis en place par l’Assurance Maladie contre la fraude sociale. Et qu’en est-il des 8 milliards de dollars d’économies du gouvernement (comment va-t-il réaliser ces économies ?) ou des 2 milliards de dollars qui correspondent à d’hypothétiques réductions de dépenses typiquement associées à l’insécurité ? Au contraire, le coût de son programme de dépenses semble être manifestement sous-estimé. C’est notamment le cas de la question très controversée des retraites (dont le coût, selon l’Institut Montaigne, est estimé à 17 milliards). Il n’y a pas de solution miracle. Les réformes successives ont permis ces dernières années d’équilibrer partiellement notre système de retraite, mais celui-ci reste fragile. On pourrait envisager une nouvelle réforme pour consolider le système, augmenter le niveau de certaines retraites, afin de mieux prendre en compte les difficultés. Mais pour y parvenir, il n’y a que trois solutions permanentes : (1) augmenter les cotisations sociales, qui sont déjà extrêmement élevées en France et grèvent le pouvoir d’achat des travailleurs et le facteur chômage, (2) réduire le montant des retraites ou (3) travaillent plus comme c’est le cas dans d’autres pays développés. Choisir entre ces trois options est un choix de société. En revanche, abaisser l’âge de la retraite à 60 ans mettra notre système en faillite, avec des conséquences importantes pour les plus démunis.
“La xénophobie de son programme va effrayer médecins, scientifiques et ingénieurs”
La plus étonnante de toutes ces propositions est que cet argent public ne permettra pas de préparer l’avenir, ni de réduire les inégalités, les dépenses étant mal ciblées. Pour ne prendre qu’un exemple, une mesure de Mme Le Pen exonérera d’impôt sur le revenu un diplômé de moins de 30 ans qui gagne cinq fois le SMIC. Il faudrait aussi ajouter des coûts directs pour les citoyens et les entreprises. la xénophobie de son programme va effrayer les médecins, scientifiques et ingénieurs dont nous avons besoin et priver nos entreprises du travail dont elles ont besoin. Après le “tout nécessaire” de la période Covid et l’invasion de l’Ukraine et la préparation d’éventuelles nouvelles crises (nouveaux virus, menaces militaires, protectionnisme étendu), nous ne pouvons plus charger le navire. Pourtant, le programme de Marin Le Pen finance en réalité la consommation et ne comprend presque rien pour créer de la richesse collective – autre que la baisse des taxes à la production, que le gouvernement actuel a déjà entamée. C’est un programme qui ne se projette jamais aux sources de notre pouvoir d’achat demain, l’éducation, l’enseignement supérieur, la recherche et le développement. Il ne répond pas à la crise climatique qui va frapper de plein fouet nos enfants et petits-enfants (sans compter que la baisse de la TVA sur les produits pétroliers, le démantèlement des éoliennes, le moratoire sur le solaire devraient nous amener à acheter de l’électricité plus chère flux de carbone à l’étranger).
La France de Marin Le Pen, une version européenne de l’Argentine
Pour financer son projet, pour attirer les entreprises créatrices d’emplois, Marin Le Pen aura besoin de la confiance des investisseurs. La dette publique est passée de 100 % du PIB à près de 116 % du PIB, mais cela n’a pas entamé la crédibilité de l’État français, car une grande partie des réformes qui ont eu lieu (sur le marché du travail, la formation professionnelle, la fiscalité) sont venues soutenir la croissance et réduire le chômage. En d’autres termes, les marchés ont estimé que cette augmentation de la dette restait viable alors que la France s’engageait sur la voie de la croissance économique. En revanche, l’imprévoyance du programme de Marin Le Pen ne rassurera pas ce dernier, qui verra en France une version européenne de l’Argentine (autrefois l’un des pays les plus riches du monde, coulé par une administration publique irresponsable). La confiance est aussi basée sur les attitudes. Comme Poutine et Trump, Marin Le Pen déteste les experts reconnus, assimilés à une “élite hors sol” et, surtout, potentiellement contradictoires. Cependant, si les experts se trompent, ils se trompent beaucoup moins souvent que ceux qui n’ont ni l’éducation ni le temps pour comprendre les problèmes complexes du monde d’aujourd’hui. et ne cherchent pas de voix. Si elle avait été au pouvoir, Marin Lepen aurait pris une position problématique sur la question des vaccins et des soins de santé, tant sur le plan sanitaire que financier. La France est un petit pays par la taille et l’Europe a besoin d’être sur la scène géopolitique : se protéger, négocier des accords internationaux, réguler le numérique, lutter contre l’évasion fiscale. Mais aussi pour résister à une éventuelle nouvelle crise financière. Si les pays très endettés d’Europe peuvent supporter aujourd’hui, c’est en partie grâce au “tout coût” de la Banque centrale européenne et à l’avancée de la construction européenne ces dix dernières années, dont le niveau budgétaire avec le plan de relance européen que la France a investi plan.
“Un Frexit qui ne dit pas son nom”
Or, si Marin Le Pen ne parle plus de sortir de l’Europe et de l’euro (“Frexit”), son programme revient à se conformer aux règles européennes et créera immédiatement une crise profonde dans l’Union, avec un impact direct sur la crédibilité budgétaire de la France. . Nos voisins européens n’accepteront jamais la création d’une « Alliance européenne des nations » que le candidat national à l’Assemblée voudrait remplacer progressivement l’Union européenne, la remise en cause de la libre circulation des biens et des personnes, la révision de la loi constitutionnelle qui établirait la suprématie du droit français sur le droit européen ou la réduction unilatérale de la contribution française au budget de l’UE, c’est un Frexit qui ne dit pas son nom. En cas de difficultés, nous n’aurions ni la BCE pour nous protéger des prêts onéreux, ni les plans de relance européens. et ce serait la fin de la PAC qui soutient tant nos agriculteurs et le développement rural. Les Français qui souffrent d’un manque de pouvoir d’achat, dont le travail est difficile, qui s’inquiètent pour leur avenir et celui de notre planète, les jeunes en recherche d’emploi et de formation ne trouveront pas dans ce programme l’accomplissement de leurs attentes. Dans notre monde stressant, il est important de résister à l’encombrement d’un programme encombré et non durable. Réfléchissons-y à deux fois avant d’adopter une politique qui appauvrit durablement notre pays.